Ce qui est important[mois de juillet 2018]

Le journal du grand Maître de thé
par KOBORI Sojitsu,
treizième grand Maître de l’Ecole Enshu Sado

Ce qui est important[mois de juillet 2018]

Ces jours-ci, le soleil tape de plus en plus fort. Nous devons faire attention, tous âges compris, au coup de soleil.

Il fut un temps où pour les Japonais, la nature était considérée comme quelque chose de bénéfique avec notamment les quatre saisons qu’elle leur offrait. Bien sûr, en même temps, elle leur donnait des épreuves dures telles que le typhon, le séisme, l’incendie et l’inondation. Mais ces épreuves pouvaient être considérées comme un avertissement à l’arrogance des hommes. Or, les changements climatiques de ces dernières années sont tellement dramatiques qu’ils nous mettent en danger. Nous sommes amenés à penser que c’est la colère de la nature contre la destruction environnementale. Il est grand temps de prendre conscience de la nécessité de protéger la nature en gardant un regard attentif sur celle-ci.

Depuis le début de cette année, un certain nombre d’expositions liées à l’art de thé ont eu lieu. Je suis allé en voir quelques-unes : « Elégance Kan-ei » au musée de Suntory ; « Matsudaira Fumai, maitre de thé daimyo » au musée mémoriel de Mitsui ; « Univers de kireisabi ou raffinement et sobriété de nos jours » au musée de thé de Shizuoka ; et celle organisée à l’occasion du centenaire de l’association des amis des beaux-arts de Kanazawa au musée départemental d’Ishikawa. Ces différentes manifestations culturelles m’ont permis de constater une fois de plus le haut degré de l’esprit et du sens esthétiques et la clairvoyance de Kobori Enshû.

La base culturelle de la ville de Kanazawa doit beaucoup à la famille Maeda qui fut le seigneur de l’ancien fiel Kaga. Le troisième seigneur Toshitsune et le troisième Mitsutaka furent tous deux disciples de Kobori Enshû. Donc, la première collection de matériels de thé de cette famille s’inspirait pour une bonne part de l’esprit d’Enshû. Certes, certains objets de cette collection devaient avoir été acquis grâce au pouvoir que détenait la famille, mais d’autres s’inspiraient à coup sûr du sens esthétique dit « raffinement et sobriété » qui était celui de d’Enshû.

Matsudaira Fumai naquit en peu plus de cent ans plus tard qu’Enshû, mais on voit combien il vénérait et admirait celui-ci si l’on jette un coup d’œil sur sa collection. Bien sûr que Fumai portait un respect pour l’école Sekishûryû qu’il fréquentait, mais il avait un respect encore plus grand pour Enshû.

Je me plais à citer deux petites phrases laissées par Fumai :
« L’essence de l’art de thé consiste en ce qui est beau, résolu et sobre »
« Ceux qui marquent le pas, ne prenant pas compte des évolutions du monde, sont mauvais pour toute une vie »
Ces phrases rejoignent l’esprit qui se dégage du fameux texte d’Enshû, dit « kakisutenofumi » qui se résume à ceci : « Si vous avez compris une chose, jetez-la ». On peut dire qu’elles correspondent également à la manière de vivre de nos contemporains.