Mon père, M. Seizo Hayashiya et moi[Octobre 2017]

Le journal du grand Maître de thé
par KOBORI Sojitsu,
treizième grand Maître de l’Ecole Enshu Sado

Mon père, M. Seizo Hayashiya et moi[Octobre 2017]

Le temps de cet été était particulièrement instable. Il se caractérisait par le fait que des pluies torrentielles frappaient des endroits particuliers en l’espace de peu de temps, faisant perdre beaucoup de vies et de patrimoines. Je rends hommage aux victimes de toutes ces catastrophes et souhaite vivement un redressement rapide des régions sinistrées.

Dans les deux dernières colonnes de cette revue, j’ai écrit les relations qui existaient entre M. Hayashi et mon père. Mais les épisodes que j’ai relatés étaient ceux que j’ai connus lorsque j’étais en coulisse en quelque sorte. Ce mois-ci, j’évoquerai un épisode des relations à trois, incluant moi-même.

Comme je l’ai écrit dans le numéro de juillet dernier, la dernière fois que j’ai admiré la perspicacité de M. Hayashiya, c’était lors de la visite que je lui ai rendue deux semaines avant sa disparition. Lorsque j’ai sorti une tasse à thé de ma corbeille, un coup d’œil jeté de loin lui a permis de reconnaitre le genre de cet ustensile. Auparavant, il y avait eu l’histoire de la cendre du premier ‘furo’ que j’ai déjà racontée. Les épisodes qui ont forcé mon admiration ne manquent pas.

Un jour, M. Hayashiya et moi avons eu l’occasion de donner une conférence à Takamatsu. En fait, initialement, c’était mon père qui devait donner cette conférence sous forme d’entretien avec M. Hayashiya au sujet de ses « arrangements des fleurs pour la cérémonie du thé ». Comme vous le savez, l’art floral de mon père était très apprécié. C’était effectivement un domaine qui lui tenait particulièrement à cœur. Le plan de la conférence consistait à ce que les deux hommes s’entretiendraient des réalisations de mon père en s’appuyant sur les planches montrant certaines de ces dernières. Mais, mon père, étant tombé malade, ne pouvait plus honorer ce rendez-vous. Lorsque je me demandais comment faire, il m’a demandé de le représenter pour cette conférence. M. Hayashiya a acquiescé à cette proposition, en estimant qu’étant proche de mon père, j’étais bien indiqué pour évoquer la question. Il m’a dit également qu’il souhait présenter certaines de mes propres réalisations à cette occasion.

C’est ainsi que, d’urgence, il a été décidé que j’accompagnerai M. Hayashiya à la place de mon père. Cette tâche m’apparaissait très lourde, même si j’étais dorénavant désigné pour succéder à mon père. Cela dit, j’espérais que M. Hayashiya appréciât un petit peu mes arrangements floraux. Je suis donc parti sur cet espoir.

Lors de la conférence, M. Hayashiya, des planches à l’appui, me demandait dans quelles circonstances et dans quel esprit tel ou tel arrangement floral avait été réalisé. En ce qui concerne les réalisations de mon père, il était inévitable que mes réponses soient quelque peu subjectives. M. Hayashiya ne faisait que dire des éloges. Une phrase telle « Comme ci comme ça » tombait de sa bouche de temps à autre.

Ce qui m’a vraiment frappé dans cette conférence était que, en regardant chaque planche sur laquelle le nom du réalisateur de l’arrangement floral n’était pas mentionné, M. Hayashiya avait dit tout de suite : « Ah, ça c’est de votre père, ceci est de vous ». La part des réalisations de mon père présentées à cette occasion était de 80%. J’étais prêt à dire : « c’est de moi », chaque fois que mon arrangement serait présenté. Mais il avait tout brûlé pour m’exprimer familièrement.

De retour à Tokyo, quand j’ai raconté tout cela à mon père, celui-ci m’a dit en souriant : « Il est capable de le savoir »

En août, nous ont quittés MM. Hattori, Kimura et Nakamura, respectivement de l’association Jikinyukai, de la fédération Hirosaki et de la fédération Hachinohe. Je saisis cette occasion pour rendre hommage à ces trois personnalités.