« Qu’est-ce être nouveau ? »[Avril 2017]

Le journal du grand Maître de thé
par KOBORI Sojitsu,
treizième grand Maître de l’Ecole Enshu Sado

« Qu’est-ce être nouveau ? »[Avril 2017]

Avec l’arrivée du mois d’avril, on entend souvent des mots ou des expressions avec l’adjectif « nouveau ». En les entendant, certains ressentent de la fraicheur et d’autres n’en sont pas satisfaits. C’est dire que la sensation des personnes varie en fonction du critère sur lequel celles-ci sont fondées.

Pour prendre l’exemple des ustensiles de la cérémonie du thé, on peut dire que le début de l’ère Edo fut à la charnière de deux époques. Quand on entend dire « ère Momoyama », on a l’impression que c’est plus ancien qu’Edo. Et si l’on se réfère à Muromachi, à Nanbokucho ou encore à Heian, on a le sentiment d’être dans une ancienneté extrêmement lointaine. Ce qui donne à penser que la charnière date d’il y a environ quatre cents ans. Plus on remonte dans le temps par rapport à cette époque charnière, plus la sensation de l’ancienneté augmente. Et si l’on va dans le sens inverse, la sensation du nouveau devient plus grande. Les choses d’il y a cent ans ne nous semblent pas très anciennes.

En ce qui concerne la littérature contemporaine, lorsqu’un écrivain célèbre publie un nouveau livre, on le considère à juste titre comme très nouveau. Mais si l’on tombe sur un ouvrage que le même écrivain a fait il y a dix ans, on a le sentiment d’assister à quelque chose de relativement ancien. A plus forte raison, lorsqu’il s’agit d’une œuvre réalisée il y a trente ans ou cinquante ans, on se dit qu’elle très ancienne. Cette sensation- là accompagne toujours l’appréciation des matériels de thé. C’est-à-dire qu’à travers celle-ci, on peut mesurer le degré de sa propre élévation.

Il peut nous arriver qu’un objet dont il faisait notre passion lorsque nous étions jeunes ne nous parait plus intéressant aujourd’hui. Et l’inverse peut nous arriver également. Il parait que le fondateur de l’école Enshû a eu des anecdotes de ce genre. La plus connue concerne le bol à thé Asukagawa.
Longtemps, j’ai vécu au bord de la rivière Asukagawa.
Le temps s’écoule très vite comme celle-ci.
Il s’agit d’un poème de Harumichino Tsuraki. Enshû, lorsqu’il vit, jeune, pour la première fois le bol Asukagawa, ne l’apprécia pas beaucoup. Mais plus tard, quand il le revit, il fut enchanté de la magnificence de ce matériel. D’où le nom donné à celui-ci.

Ainsi, dans notre vie, la sensation de l’ancien et du nouveau évolue de temps à autre. Ce qui importe à nous qui nous inspirons d’une culture traditionnelle, est que, tout en apprenant sérieusement les rituels bien établis, nous envisageons le nouveau. Tel est l’esprit d’invention qui constitue la principale thématique de la culture traditionnelle.