Les liens[juillet 2013]

Le journal du grand Maître de thé
par KOBORI Sojitsu,
treizième grand Maître de l’Ecole Enshu Sado

Les liens[juillet 2013]

Nous assisterons bientôt à une saison où la chaleur envahira tout l’archipel japonais. Cette année, l’instabilité climatique, traduite notamment par l’alternance du froid et de la chaleur, est telle que l’expression « anomalie climatique » est très courrament utilisée.

Une telle instabilité affecte notamment les végétaux. Les praticiens de l’art de thé sont directement concernés par ce problème. En effet, à la différence des années normales du point de vue climatique, nous avons du mal à trouver des fleurs adaptées à la saison pour décorer le ‘tokonoma’, si bien que nous nous mettons martel en tête chaque fois qu’il y a une cérémonie du thé.

Je me permets d’évoquer ici une manifestation qui s’est déroulée le 6 mai dernier à Kanazawa, suite à la découverte dans le mont Noda à Kanazawa des tombes de proches du fondateur Enshû. La revue « Enshû » avait déjà fait part de cette découverte.

L’un des proches d’ Enshû dont on a identifié la sépulture est Magobei, fils cadet de Kobori Samanosuke Masaharu, le plus jeune frère d’ Enshû. Du vivant de ce dernier, Samanosuke, qui servait le seigneur féodal Maeda, accompagnait systématiquement Maeda Toshitsune et Maeda Mitsutaka, respectivement le troisième et le quatrième chefs de famille Maeda, lorsque ceux-ci allaient s’entraîner à la cérémonie du thé auprès d’ Enshû. Sans entrer dans le détail, je me permets de signaler que ce personnage contribua non seulement à la prospérité de la famille Enshû, mais aussi à celle de la famille Urasenké, puisqu’il joua un rôle déterminant dans l’embauche de Senso Soshitsu d’Urasenké par la famille Maeda. Magobei, fils cadet de Samanosuke, servait également le seigneur féodal Maeda.

L’autre proche dont on a découvert la tombe est un enfant d’une des filles d’ Enshû, c’est-à-dire un petit enfant de ce dernier, nommé Shinjuro. Adopté ultérieurement par la famille Maeda, il servit cette dernière. Shinjuro était essentiellement chargé de la protection de la famille Maeda.
Tout cela montre combien étaient forts les liens tissés par la famille Maeda avec la famille Enshû.

Les tombes de déscendants de ces deux personnage ayant été également découvertes, des élèves bénévols de la Fédération de Kanazawa Kenroku de l’Ecole Enshû et quelques autres personnalités ont pris l’initiative d’aménager l’ensemble des sépultures. Suite à cet événement, il fut décidé que sera créée « une Association pour la conservation des objets liés à la famille Enshû ». Une cérémonie célébrant sa création fut organisée avec pour programme des conférences et des cérémonies du thé. J’ai eu l’honneur d’être invité à cette cérémonie qui réunissait de nombreuses personnalités-un peu plus de quatre cents-ont participé, témoignant d’un grand intérêt que suscitait l’événement. Ce jour, M. Honda Masamitsu, quinzième chef de famille Honda, adjoint en chef au seigneur féodal Maeda, a honoré la réunion de sa présence et accepté de prendre la fonction de président de l’Association.

Le lieu de la cérémonie était l’hôtel Kanazawa New Grand, l’emplacement de la maison de Shinjuro, le petit enfant d’Enshû qu’on a cité toute-à-l’heure. A cette occasion, un monument en pierre a été érigé à la mémoire des proches du fondateur Enshû et je suis très heureux d’avoir écrit une inscription sur ce monument. Ce jour, j’ai constaté une fois de plus la force des liens qui unissent la famille Maeda et la mienne.

Le réseau d’amitiés qu’avait Enshû à l’époque d’Edo était nettement plus large que que ceux que tissaient les fondateurs des autres écoles de thé. Les relations ainsi construites par Enshû perdurent enconre aujourd’hui pour une large part grâce au fait qu’elles datent de l’après-guerre domestique. Nous sommes très honorés de bénéficier de ces relations anciennes.

(Pour plus amples informations sur cette affaire, veuillez vous référer à l’article intitulé « Le fief Kaga et la famille Enshû » paru dans le numéro d’avril de l’an dernier de la revue Enshû).