Une fillette

Le journal du grand Maître de thé
par KOBORI Sojitsu,
treizième grand Maître de l’Ecole Enshu Sado

Une fillette

Du 9 au 16 septembre dernier, j’ai visité la ville de Vienne en Autriche et celle de Bratislava en Slovaquie pour y effectuer des échanges culturels à travers la cérémonie du thé. Une trentaine de personnes ont participé à ce voyage. Chacune des cérémonies du thé organisées à cette occasion a eu un grand succès.

Savez-vous que 2009 est l’année des échanges entre l’Autriche et le Japon ? C’est dans ce cadre-là que j’ai fait cette tournée européenne à l’invitation de M. Tanaka, Ambassadeur du Japon en Autriche. A Bratislava, M. Nomoto et son épouse, Ambassadeur du Japon en Slovaquie, nous ont cordialement invités à leur résidence pour que je donne une cérémonie du thé devant des diplomates et artistes slovaques.

A Vienne, j’ai donné deux cérémonies du thé, une dans le jardin ‘Setagaya’ (Setagaya est un des arrondissements de Tokyo qui est jumelé avec le 19e arrondissement de Vienne) et l’autre au Musée ethnologique. Au total, j’ai reçu un peu plus de trois cent visiteurs. Ce que j’ai constaté lors de ces cérémonies est que les visiteurs m’ont posé beaucoup de questions. D’ailleurs, c’est ce que je constate chaque fois que je donne une conférence à l’étranger. Parfois, le temps consacré aux questions/réponses est plus long que celui accordé à la cérémonie du thé elle-même.

Je me plais à évoquer ici un épisode qui m’a impressionné. Après avoir donné la première séance de thé dans le jardin de Setagaya, j’ai quitté le lieu de cérémonie pour me promener un peu. C’était un samedi et il y avait beaucoup de citoyens qui y venaient. Et comme il était impossible de donner du thé à tout le monde, un grand moniteur avait été installé à proximité du lieu de cérémonie pour que ceux qui n’avaient pas de chance pussent suivre mes actes en direct et en différé.

Lorsque je regardais les images de ma première séance en différé, l’Ambassadeur Tanaka est venu à mes côtés. Comme M. Tanaka est un de mse disciples, j’ai pensé qu’il s’intéressait à mes actes. C’est alors qu’une fillette, âgée apparemment moins de dix ans, s’est posée devant le moniteur et s’est immobilisée comme possédée de quelque chose. Entre-temps, j’ai dû retourner sur le lieu de cérémonie pour y donner une seconde séance de thé. Au cours de celle-ci, j’ai vu que l’Ambassadeur avait guidé cette fillette jusqu’au lieu de cérémonie pour que celle-ci pusse regarder mes actes.

A l’issue de la cérémonie du thé, l’Ambassadeur nous a dit : « Cette fillette a dû avoir une révélation. L’art de thé est si puissant que cela ». J’étais enchanté de ce propos.